Votre situation
Votre enfant a disparu, et vous avez la certitude qu’il s’agit d’une fugue (il/elle a laissé un mot, vous avait menacé de le faire juste avant…) ? Vous ne savez pas quoi faire pour le retrouver ou le/la faire revenir à la maison ? Vous ne comprenez pas les raisons pour lesquelles votre enfant est parti(e), vous n’avez rien vu venir ?
Cette fiche s’appuie sur les recommandations du CFPE-Enfants Disparus, qui gère la ligne 116 000 spécialisée dans les disparitions d’enfants. Elle vous orientera le mieux possible face à cette situation.
La fugue : qui et pourquoi ?
La fugue n’est pas un événement rare. Selon une enquête de deux chercheurs de l’INSERM, 5% des 11-18 ans déclarent avoir fait une fugue dans l’année, soit 240 000 jeunes.
Fort heureusement, la plupart des fugues se terminent bien, avec le retour de l’enfant. Elles sont néanmoins toujours à prendre au sérieux car elles révèlent le plus souvent une souffrance chez l’enfant, elles sont le symptôme d’un mal-être.
Il est possible que vous connaissiez exactement les raisons pour lesquels votre enfant est parti : le climat familial était très dégradé, votre communication rompue… mais il se peut également que vous n’ayez rien vu venir. Il n’y a pas « une fugue-type », les adolescents peuvent fuguer pour de nombreuses raisons.
Le CFPE-Enfants Disparus en distingue plusieurs :
- La fugue de rébellion : l’enfant a besoin de liberté et s’oppose à l’autorité de ses parents
- La fugue sous l’influence d’un tiers : l’enfant a rencontré une personne avec qui il entretient une relation d’amitié ou d’amour, et cette personne lui promet une vie meilleure ou trépidante avec elle, en dehors de son domicile familial.
- La fugue par mal-être
- La fugue de « survie » : l’enfant cherche à fuir un danger, des représailles (peur d’être puni(e) après une « bêtise » par exemple) ou cherche à échapper à un environnement néfaste.
- La fugue par opposition au placement
- La fugue test : l’enfant cherche à tester le degré d’attachement qu’ont ses parents pour lui.
Mon enfant vient de fuguer : quoi faire en premier ?
Lorsque son propre enfant a disparu, on a souvent l’impression que le monde s’écroule, c’est la panique. Essayez de garder votre calme pour être efficace.
Quand appeler la police ? Quoi et où chercher ? Le CFPE-Enfants Disparus, spécialisé dans les disparitions d’enfants, détaille les premières démarches à faire sur cette page.
- Parti faire le djihad ?
Avez-vous remarqué des signes de radicalisation ces derniers temps chez votre enfant ? A-t-il/elle abandonné certaines activités, arrêté de voir certains amis ? Tient-il/elle des propos que vous trouvez choquants ? Vous pensez que votre enfant peut avoir fugué pour rejoindre des groupes terroristes ou faire le djihad ? Nous vous conseillons fortement de vous diriger vers la fiche de notre outil qui correspond à cette situation.
Pendant la fugue
Après le signalement fait à la police, poursuivez vos recherches.
Le CFPE-Enfants Disparus, spécialisé dans les disparitions d’enfants, explique comment vous pouvez procéder ici.
Vous pouvez à tout moment appeler le 116 000 Enfants Disparus, pour être écouté(e) et soutenu(e) durant toute la durée de la fugue, jusqu’au retour de votre enfant. Ils sauront vous conseiller sur les démarches que vous pouvez entreprendre, l’utilité de publier un avis de recherche. Le numéro est gratuit et joignable 24h/24 et 7j/7.
- Votre enfant prend contact avec vous
Quelques conseils du CFPE-Enfants Disparus pour gérer cette situation, sur ici.
- Votre enfant ne souhaite pas revenir
Votre enfant vous fait part de sa volonté ferme de ne pas revenir chez vous. Y a t-il une chose avec laquelle il/elle n’est pas à l’aise à la maison ? A-t-il/elle un beau-père ou une belle-mère avec qui les relations sont difficiles ? L’environnement familial est-il violent, vous disputez-vous régulièrement avec votre conjoint(e) ou votre enfant ?
Privilégiez la communication avec votre enfant en évitant de vous braquer et en essayant de savoir pourquoi il/elle ne souhaite pas revenir, même si ce qu’il/elle vous dit vous blesse ou ne vous convient pas. Proposez-lui une médiation, avec une personne de confiance neutre qui ne prendra pas parti pour quelqu’un, ou avec un(e) professionnel(le). Il existe de nombreuses structures qui peuvent intervenir, à un coût fixé en fonction de vos moyens (pouvant démarrer à 2€). Vous trouverez toutes les associations qui font de la médiation près de chez vous.
Si votre enfant reste campé(e) sur sa décision, vous pouvez peut-être lui proposer d’être hébergé(e) pendant un moment chez un membre de votre famille ou une personne de confiance. L’important est dans un premier temps de le/la sortir des risques auxquels il/elle s’expose en fuguant.
Vous pouvez également lui proposer de saisir le Juge des enfants afin qu’il/elle soit, au moins provisoirement, accueilli(e) dans une structure où il/elle sera en sécurité. Pour ce faire, vous devez envoyer un courrier au Juge des enfants du Tribunal de Grande Instance dont vous dépendez (vous le trouverez dans cet annuaire).
Préparer son retour
Le CFPE-Enfants Disparus est à votre disposition pour vous écouter et vous soutenir dans la préparation et le retour de votre enfant. Vous pouvez les contacter 24h/24 et 7j/7 au 116 000. Ce numéro est gratuit, que l’appel soit passé depuis un fixe ou un mobile.
Avant de le/la revoir.
Réfléchissez aux différentes raisons qui auraient pu amener votre enfant à fuguer. Avez-vous remarqué des changements depuis quelques temps ? Vous avait-il/elle parlé de quelque chose auquel vous n’avez pas prêté très attention ? Qu’est-ce que vous seriez prêt(e) à changer dans votre relation quand il/elle rentrera ?
L’accueillir.
Prenez le temps de l’accueillir, montrez-lui à quel point vous êtes heureux(se) de le/la retrouver. Évitez de lui faire des reproches et de le culpabiliser. Un enfant n’est pas fier de fuguer, même s’il/elle veut le faire croire. Ne dramatisez pas, mais ne banalisez pas non plus la situation.
Dites bien à votre enfant que peu importe ses bêtises ou sa fugue, cela ne diminuera jamais l’amour que vous lui portez. Si par ailleurs, vous avez pu, sur le coup de la colère, dire des paroles blessantes (« Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça… », « J’aurais pas dû t’avoir ! »…), il est important que vous lui présentiez vos excuses et le rassuriez. Les adultes, comme les enfants, peuvent faire des erreurs, personne n’est infaillible.
Laissez-lui un peu de temps pour se reposer, prendre une douche, changer de vêtements, manger, avant de discuter ensemble de ce qu’il s’est passé.
En discuter.
Ne faites pas l’impasse sur la discussion. La fugue est souvent la conséquence de difficultés. Ce n’est pas parce que votre enfant revient de lui/elle-même qu’il/elle ne tentera pas à nouveau de fuir. Il est donc primordial de parler, d’écouter et de trouver ensemble des solutions pour que cela ne se reproduise plus.
Demandez-lui la raison de cette fugue, ce qu’il/elle cherchait à fuir, s’il/elle a trouvé ce qu’il/elle recherchait en fuguant, comment il/elle s’est senti, si cela lui a fait du bien et pourquoi, s’il/elle a eu peur… l’important pour le moment n’est pas de savoir avec qui il/elle était et où. Vous pourrez éventuellement lui poser ces questions plus tard, une fois les relations apaisées.
Laissez-le/la parler et s’exprimer avec ses mots et ses émotions (angoisse, tristesse, colère, stress…).
Il est important de ne pas nier ou minimiser la souffrance de votre enfant. Le ressenti est personnel : un événement paraissant anodin peut avoir une résonnance très forte chez lui/elle et générer une souffrance que vous êtes loin d’imaginer. Apprenez à reconnaître vos erreurs face à votre enfant.
Parfois, il peut s’agir d’un mal-être extrêmement profond, lié à des événements dont vous ne soupçonnez pas l’existence ou l’intensité (une agression sexuelle, du harcèlement scolaire…). Il est important de dire à votre enfant que vous être prêt(e) à tout entendre, et que vous êtes là pour le protéger et l’aimer. Si cela lui est trop difficile, acceptez le fait qu’il/elle ne puisse pas tout vous dire, dites-lui que l’important est d’en parler à quelqu’un de confiance et dirigez-le/la vers quelqu’un à qui il/elle pourra se confier librement.
Vous pouvez vous référer aux autres fiches de notre outil, qui vous donneront davantage d’informations sur certaines problématiques (violences sexuelles, harcèlement scolaire…) et sur les structures qui peuvent vous aider.
Si la discussion paraît impossible, que votre enfant est complètement braqué(e) et s’enferme dans le silence ou dans la violence, n’hésitez pas à faire appel à une aide extérieure. Vous trouverez des pistes dans la partie « Après le retour : obtenir une aide ».
Proposer des solutions.
Établissez de nouvelles règles que vous et votre enfant vous engagez à tenir. N’hésitez pas à le/la féliciter lorsque les engagements sont tenus.
Faire un check-up médical.
Si votre enfant s’est mis en danger sur le plan sexuel en ayant des rapports non protégés, s’il/elle a subi des agressions sexuelles ou physiques, s’il/elle a touché à des substances illicites ou dont il/elle ne connaissait pas la nature, s’il/elle a fait usage de seringues, s’il/elle est resté un long moment sans se nourrir ni s’hydrater… un bilan médical s’avère nécessaire. N’hésitez pas à laisser votre enfant seul(e) en présence du médecin. Il/elle sera ainsi moins gêné(e) et pourra plus facilement s’exprimer sur ce qu’il s’est passé et sur les risques qui ont été pris.
L’important n’est pas que vous sachiez tout, mais que tout soit fait pour que votre enfant reste en bonne santé.
Après le retour : obtenir une aide
Plusieurs possibilités s’offrent à vous si la communication avec votre enfant reste difficile, ou que vous souhaitez être aidé(e) pour améliorer vos relations au quotidien.
Contacter le 116 000.
Le CFPE-Enfants Disparus fournit un accompagnement au retour des fugues pour vous aider à renouer le lien et à prévenir la récidive.
Faire appel à un(e) médiateur(trice).
Lorsque le dialogue est rompu, faire appel à un médiateur peut grandement vous aider, vous et votre enfant. Il/elle interviendra entre vous pour que chacun puisse s’exprimer et entendre ce que l’autre a besoin de dire. La prise en charge est faite en fonction de vos moyens et peut même démarrer à 2€ pour ceux qui ne disposent pas de revenus suffisants.
Vous pouvez aussi vous adresser à une personne neutre (un oncle, une amie de la famille…), qui ne prend pas parti, pour faire une médiation entre vous et votre enfant.
Obtenir un soutien psychologique.
Votre enfant vous fait part d’un mal-être profond ? Vous sentez que votre aide seule ne sera pas suffisante ? Un accompagnement psychologique peut être envisagé. Vous pouvez consulter gratuitement un psychologue à la Maison des Adolescents (trouver la plus proche de chez vous en vous rendant sur le site), avec ou sans votre enfant. Les Centres Médico-Psycho-Pédagogiques (prise en charge des enfants de 0 à 20 ans) ou les Centres Médico-Psychologiques (prise en charge des adultes et des enfants) peuvent également vous proposer des consultations gratuites (trouver le plus proche en utilisant cette carte pour les CMPP).
Vous avez également la possibilité de consulter un psychologue exerçant en libéral (non remboursé par la sécurité sociale, parfois par la mutuelle), ou un pédopsychiatre (remboursé par la sécurité sociale).
Expérimenter le parrainage de proximité.
Le parrainage de proximité consiste à mettre en lien un enfant avec un parrain ou une marraine « de cœur ». Cette relation lui permet de découvrir de nouvelles choses, de pouvoir se confier à une personne de confiance… et à vous, de décompresser un peu, d’obtenir du soutien et de la bienveillance. Lorsque vous faites face à des difficultés personnelles, il n’est pas toujours évident de pouvoir communiquer sereinement avec son enfant et lui accorder tout le temps que l’on voudrait. Si vous sentez que la présence d’un(e) adulte bienveillant(e) à ses côtés pourrait lui faire du bien et lui apporter un soutien moral, n’hésitez pas à contacter les associations de parrainage de proximité qui se trouvent près de chez vous (France Parrainages ou Parrains par Mille, par exemple).
Obtenir un soutien éducatif.
Si votre enfant a un comportement violent, que vous avez du mal à lui faire appliquer les règles de la maison, un soutien éducatif peut s’avérer nécessaire et utile. Il peut prendre la forme d’une aide éducative à domicile, d’un accompagnement par un technicien en intervention sociale et familiale, etc.
Le soutien éducatif est un service public, aucun paiement ne vous sera demandé.
Une évaluation de vos besoins par un(e) travailleur(euse) social(e) est d’abord nécessaire pour vous proposer la solution la plus adaptée. Vous pouvez directement vous adresser à votre mairie en demandant à rencontrer un(e) assistant(e) social(e). Cette rencontre peut se faire sur rendez-vous ou lors de ses permanences à la mairie. Vous avez également la possibilité de vous adresser aux services de l’Aide Sociale à l’Enfance. Votre mairie pourra vous communiquer les coordonnées. Enfin, vous pouvez aussi rencontrer un(e) travailleur(euse) social(e) en allant à la Maison des Adolescents (trouver la plus proche de chez vous en utilisant cette carte).
Il est aussi possible de faire appel à un(e) éducateur(trice) dans le secteur privé, mais ses interventions seront alors à votre charge.
Saisir le Juge des enfants.
Si votre enfant ne souhaite absolument pas revenir au domicile, qu’il/elle vous menace à chaque instant de fuguer de nouveau, que vous avez essayé les précédentes solutions mais que rien ne fonctionne… il est peut-être préférable d’éloigner pendant au moins un temps votre enfant de son domicile.
Pour ce faire, vous devez envoyer un courrier au Juge des enfants du Tribunal de Grande Instance dont vous dépendez (le trouver dans cet annuaire) Plusieurs solutions pourront être envisagées, en fonction de la situation : un accueil auprès d’un membre de votre famille, ou d’une personne digne de confiance, une prise en charge en Lieu de vie et d’accueil ou dans un établissement de l’Aide Sociale à l’Enfance, etc.
Ce que dit la loi sur…
La fugue
Lorsque l’enfant est mineur, il ne peut quitter le domicile familial sans la permission de ses parents ou de son/sa tuteur(trice) (article 371-3 du Code civil).
Le détournement de mineur(e)
Une personne ne peut pas héberger votre enfant sans votre consentement, sauf si votre enfant est victime de violences au sein de sa famille. Autrement, il s’agit de détournement de mineur, qui est puni par la loi (articles 227-7 et 227-8 du Code pénal).
Δ Contrairement à une idée reçue, le détournement de mineur ne concerne pas les relations sexuelles entre une personne majeure et une personne mineure.
Sont également répréhensibles :
- Le fait de provoquer directement un(e) mineur(e) à faire un usage illicite de stupéfiants, puni de 5 ans à 7 ans d’emprisonnement, et de 100 000 à 150 000 € d’amende (article 227-18 du Code pénal).
- Le fait de provoquer directement un(e) mineur(e) à transporter, détenir, offrir ou céder des stupéfiants, puni de 7 à 10 ans d’emprisonnement et de 150 000 à 300 000 € d’amende (article 227-18-1 du Code pénal).
- Le fait de provoquer directement un(e) mineur(e) à la consommation habituelle et/ou excessive de boissons alcooliques, puni de 1 à 4 ans d’emprisonnement, et de 15 000 à 90 000 € d’amende (article 227-19 du Code pénal).
- Le fait de provoquer un(e) mineur(e) à commettre un crime ou un délit, puni de 5 à 7 ans d’emprisonnement et de 150 000 € d’amende (article 227-21 du Code pénal).
- Le fait, pour un(e) majeur(e) d’exercer sans violence, contrainte, menace ni surprise une atteinte sexuelle sur la personne d’un(e) mineur(e) de moins de 15 ans, puni de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende (article 227-25 du Code pénal).
Les obligations parentales
Les parents ont l’obligation d’assurer un hébergement et de veiller à la sécurité de leur enfant (articles 371-1 et 371-2 du Code civil).
Cette réponse a été rédigée par l’équipe de la Fondation pour l’Enfance, en s’appuyant sur les recommandations de l’association CFPE-Enfants Disparus, qui a par ailleurs aimablement contribué à cette réponse en faisant part de son expertise sur le sujet.